19 février 2014

Les lignes de la main et les cerfs-volants




À mon arrivée à Jaipur, mon chauffeur de rickshaw m'avait invité à passer chez lui pour le Festival des cerfs-volants. Ce jour-là, en débattant avec moi-même, j'avais de la difficulté à décider si je devais lui téléphoner ou non. Je craignais de rester coincé je-ne-sais-où et de ne pas pouvoir profiter de la journée comme il me chantait.

J'ai donc décidé d'aller visiter la palais de la ville, considéré comme une attraction principale. À vrai dire, il n'y avait pas grand-chose de passionnant dans ce palais. On y trouve bien une exposition d'habits, d'armes originales aussi, mais rien de trop enthousiasmant.

On m'a raconté à quelques occasions que les cartomanciens sont particulièrement efficaces à Jaipur. Je ne crois pas tellement en celui du palais, à qui j'ai accepté de verser 200 roupies. Outre une longue vie, il m'a prédit que je deviendrais riche. Il semble que la voie des communications est la meilleure que je puisse emprunter pour une carrière professionnelle. Pour le reste, une liste de numéros chanceux. Rien de bien personnel.

Il a aussi tenté de me vendre une bague dont la pierre devait remédier à mon incapacité à prendre des décisions... Ma décision à ce sujet a été très claire. Non!

Après un passage au temple des singes, qui n'a rien de bien impressionnant, sauf peut-être une jolie vue sur la ville, j'ai demandé à mon chauffeur de m'amener au palais sur l'eau, où les célébrations devaient être flamboyantes. Il voulait gonfler le prix sur lequel on s'était entendus. J'ai été ferme, un beau gros non, et il n'a pas rouspété.
Puisqu'il n'y avait rien pour écrire à sa mère sur les quais, sauf peut-être ces femmes qui roulaient leur pain à même le sol (miam!), j'ai téléphoné à mon « ami » chauffeur de rickshaw pour me rendre chez lui.

En chemin, nous nous sommes arrêtés pour acheter des cerfs-volants. Une vingtaine. Et nous nous sommes enfoncés dans un quartier indien loin d'être touristique. Chez lui, une maison bétonnée qui a toutes les allures d'un chantier de construction, sans décoration ou ameublement, nous sommes allés directement sur le toit.

Là-bas, le toit n'est qu'un autre étage de la maison. Il y avait un dizaine de personnes. Rapidement, on a envoyé une jeune fille chercher du thé. Les jeunes garçons me dévisageaient. Le patriarche, lui, était heureux de pratiquer son français. Il l'avait appris à force de discuter avec les touristes.

On m'a placé un cerf-volant entre les mains. Mine de rien, il faut comprendre le principe pour éviter de le laisser s'écraser. Dès que l'engin piquait du nez, un Indien se ruait sur moi pour sauver la donne. Parce qu'à tout moment, le fil à pêche se casse, on perd le cerf-volant et il faut recommencer.

Après un moment, j'ai saisi le principe. J'en suis même venu à couper les cordes d'autres festivaliers. Mes amis indiens étaient en liesse.

On s'est déplacé sur le toit d'une autre maison, où un père de famille laissait ses enfants fumer sans gêne, même son plus jeune âgé de deux ans maximum.

Et quand la nuit s'apprêtait à tomber, nous avons visité une troisième maison, où se trouvaient des touristes hollandais. Là aussi, les enfants se montraient impressionnés. Ils ne souhaitaient qu'une chose : être pris en photo.

Quand la noirceur est tombée, il restait encore des dizaines de cerfs-volants dans le ciel. La plupart des habitants, qui avaient congé cette journée-là, ont fait volé des cerfs-volants du matin au soir. Plusieurs arboraient des coupures aux doigts, des blessures de guerre qui, selon eux, en valaient bien la peine.

Et la musique s'est mise de la partie. Certains lançaient des feux d'artifice. D'autres allumaient des lanternes qu'ils laissaient s'envoler et qu'on voyait s'écraser au loin.

Puis, mon chauffeur m'a ramené à mon hôtel, tentant au passage de convaincre de touristes de passer la soirée avec lui. Les deux jeunes filles ont répété non à plusieurs occasions. En bon Indien, mon jeune chauffeur a insisté. Se résignant plusieurs minutes après sa première tentative, il m'a assuré que ces jeunes femmes cherchaient bel et bien de la compagnie ce soir. Humm! Les Indiens...

C'est ce soir-là, vers minuit, que j'ai parcouru quelques ruelles, mon bagage sur le dos, pour gagner la gare, où un train de nuit m'attendait pour me mener vers Jaisalmer.

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