Centre-ville de Kigali |
L'aéroport de Kigali est tout petit. Il faut quand même un peu de temps pour qu'on termine la vérification du passeport et qu'on y colle le visa, rempli à la main. Le sourire n'est pas inclus dans l'accueil.
La chance, j'ai des amis qui vivaient à Kigali au moment de
mon passage et qui sont venus me chercher en voiture. À première vue, la
capitale rwandaise paraît étendue, mais conserve une bonne proportion de
nature. Outre quelques gratte-ciel au centre, les bâtiments sont plutôt modestes.
Avec ses nombreuses collines, j'avoue que j'étais un brin
désorienté à savoir par où il fallait
passer pour atteindre la destination souhaitée. Il faut parfois contourner une
colline, monter et redescendre, ce qui contraste avec notre habitude de
circuler en ligne droite. Et il faut prendre sa place dans la circulation,
parce qu'on ne vous fera pas de cadeaux.
L'appartement de mes amis se trouvait à flanc de colline avec une vue vers une espèce de bidonville.
« C'est beau en bas? Ils sont gentils les gens? » que je
demande.
Aucune idée, répondent mes amis, qui ne s'y sont jamais
aventurés.
Le bidonville près de la résidence de mes amis |
Laissant tous mes effets personnels derrière, je suis
descendu vers le regroupement de petites maisons de fortune. Les adultes me
regardaient d'un air étrange alors que les enfants accouraient, pratiquaient
leur anglais. Parce que le français disparaît à vitesse grand V dans la
capitale. Et que les enfants apprennent l'anglais.
Rapidement, les « Give me money » affluent. Suffit de se
faire l'oreille et on comprend. Une dizaine de minutes plus tard, je suis
rentré.
Ma première activité, après avoir hélé un boda-boda, ces
moto-taxis à prix plus qu'abordable, était de récupérer mon permis pour visiter
les gorilles dans la région de Kinigi, à la frontière avec l'Ouganda et le
Congo. Le bureau du tourisme se trouvait au centre-ville de Kigali, où on
n'entre nulle part, ou presque, sans passer au détecteur de métal.
Le fameux permis, une copie conforme de celui qu'on m'avait
envoyé par courriel, m'aura gobé deux heures. On insistait pourtant pour que je
passe le prendre, alors qu'il ne s'agissait que d'une vulgaire feuille de
papier, comme celle que j'avais imprimée.
Même au bureau du tourisme, où j'ai cueilli mon permis, on hésitait à fournir une réponse quand je
demandais ce qu'il y a à voir à Kigali. On m'a recommandé l'Hôtel des Mille
Collines, historique du fait qu'on y a sauvé un millier de Rwandais pendant
le génocide. Et le Camp Kigali.
Camp Kigali |
Camp Kigali |
Celui là, désert à mon arrivée, est le lieu où dix casques bleus belges ont été assassinés le 7 avril 1994 pendant le génocide. Armés seulement de pistolets, ils se sont réfugiés dans une école, où ils ont résisté pendant deux heures. Au final, ils ont tout de même été abattus.
À mon arrivée, Cyprien, le jardinier, affirmait être aussi
le guide. Il m'a fait faire le tour du bâtiment, où quelques panneaux
d'interprétation ont été installés. Sur une ardoise, des membres des familles
des victimes ont aussi laissé des messages. Dans le jardin, une dizaine de
stèles commémoratives ont été érigées.
À ma sortie, Jane, une étudiante, m'a abordé et a demandé si
elle pouvait me suivre. Elle m'a amené à la station de bus locale, celle où se
rassemblent les véhicules du transport en commun à l'intérieur de la ville, pour
manger dans une espèce de buffet. Bien sûr, elle m'a demandé si je pouvais lui
payer le repas. Considérant le prix, et parce que je pouvais échanger avec une
Rwandaise, j'ai accepté.
Nous avons ensuite pris un de ces bus vers le Kigali Genocide Memorial, un musée complet, poignant, qui raconte le génocide du Rwanda, mais
qui consacre aussi un étage aux autres grands génocides : l'Holocauste, le
Cambodge, la Bosnie, la Namibie, l'Arménie...
Kigali Genocide Memorial |
Un audioguide est disponible. Si vous aimez les musées et voulez en apprendre beaucoup sur l'histoire du génocide, il peut être utile. Si comme moi, au bout de deux heures, vous êtes certain d'en avoir assez, la seule lecture des panneaux d'interprétation suffira.
Les images et les témoignages sont durs. On présente les
prémisses du génocide, comment les classes Hutu et Tutsi ne sont rien d'autre
qu'une création européenne. Comment les Hutus s'en prenaient tout à coup aux
Tutsis qu'ils côtoyaient quotidiennement. Comment une femme est demeurée cachée
plusieurs jours dans un plafond. Comment des femmes étaient violées, laissées pour
mortes.
Les plus sensibles seront troublés par la galerie de
l'avenir perdu, la section consacrée aux enfants. Là, des portraits géants
présentent de mignonnes petites bouilles souriantes. Ces gamins ont pourtant
été assassinés. Sous chaque photo, un écriteau donne le nom de l'enfant, son
âge et la façon dont il est mort.
Une salle de réflexion, calme, a été prévue pour permettre
de décompresser après la vue de toutes ces images. Il est aussi possible de
déambuler dans le jardin, aussi conçu pour inspirer le calme.
De là, je suis rentré pour célébrer l'anniversaire de mon
amie, qui avait invité quelques collègues à son appartement pour l'occasion.
Jane m'a aidé à trouver un boda-boda et à négocier le prix pour qu'il soit
raisonnable.
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