14 juin 2015

Le train renversé



Un autre incontournable au Sri Lanka était le pic d'Adam, cette montagne où Adam serait apparu sur la planète. Les Sri lankais y font un pèlerinage en montant les quelque 5000 marches pour prier au temple qui se trouve au sommet. Le meilleur moyen de s'y rendre en transport en commun est probablement de prendre le train jusqu'à Hatton.

J'avais convenu avec mes nouveaux amis français de prendre le train de 8 h 15, ce qui nous donnerait le temps de nous poser un peu à Hatton, en après-midi. C'est qu'il est recommandé d'amorcer l'ascension vers 2 h du matin. Alors vaut mieux se donner le temps d'arriver, de se trouver un hôtel, d'acheter quelques victuailles et de manger avant d'aller piquer un roupillon.

Ne voyant aucun signe de mes amis à la gare, j'ai acheté trois billets de deuxième classe sans siège réservé. Quelques minutes plus tard, Johan et Claire apparaissent avec des billets de troisième classe avec sièges assignés.

Sur le quai de la gare de Kandy, les passagers potentiels s'agglutinent. On essaie de figurer la meilleure stratégie pour se trouver un siège quand le convoi arrivera, mais tout est laissé au hasard. Surtout qu'on hésite à savoir si on doit opter pour la deuxième ou la troisième classe.

On choisit finalement la deuxième classe en prenant le pari que des sièges se libéreront. Considérant que le Nouvel an arrive, les wagons sont bondés. Le mieux qu'on arrive à faire, c'est de s'asseoir par terre, ou sur notre sac à dos, tout près d'une des portes ouvertes. Nous sommes bien tassés.

D'ailleurs, à la gare, un Sri lankais nous annonçait un problème majeur au moment de changer de train. Une mise en garde que nous n'avons pas prise au sérieux considérant qu'il n'a jamais été question de changer de train.

Au fur et à mesure que nous multipliions les arrêts, des passagers descendaient, ce qui libérait quelques sièges. Après environ deux heures, le dernier d'entre nous a finalement pu se poser. On dit qu'il est préférable de s'asseoir à la droite du train pour profiter des paysages. Au point où on en était, on s'en foutait royalement.

Puis, le train s'est immobilisé au milieu de nulle part. Niet. Plus un mouvement. Pas de gare non plus. En regardant par la fenêtre, on voyait des gens sauter du convoi, d'autres qui s'approchaient avec des échelles de bois. La foule s'est agitée, a commencé à récupérer ses bagages.

Il fallait descendre, qu'on nous disait. Tout à coup, c'était l'évacuation, sans la panique. Mine de rien, descendre d'un train quand il n'y a pas de quai, c'est quelque chose.




À travers tous ces voyageurs, les bagages sur le dos ou à bout de bras, au milieu du champ, nous marchions le long des rails. Puis, nous avons compris. Un wagon-citerne renversé entravait la voie. Impressionnant.

Sans trop de directives, nous avons contourné le wagon et nous avons poursuivi la marche entre deux parois rocheuses jusqu'à ce que des gens devant nous nous demandent de nous arrêter et de demeurer en retrait. Pas de place pour nous éloigner, il nous restait à nous coller aux rochers pendant qu'un nouveau train s'approchait.



Ce nouveau train, bondé, se viderait de ses passagers pendant que nous tentions d'y monter. Bordel total. Sans ordre aucun, tout un chacun cherchait le bon wagon et le bon siège. Il a bien fallu une heure pour que nous puissions repartir.

Sans surprise, nous avons entrepris le reste du trajet debout, parce qu'il n'y avait plus de place pour nous asseoir.

Il a fallu quelques minutes pour que Claire s'aperçoive qu'une sangsue s'était accrochée à son pied pendant le transfert. Pas surprenant considérant la voracité de ces bestioles. Elle n'était probablement pas la seule à en avoir chopé quelques-unes.

De là, le trajet s'est poursuivi sans encombres et nous sommes arrivés à Hatton avec environ deux heures de retard. Et il nous restait au moins une heure d'autobus sur des routes sinueuses.